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Luang Prabang, l’offrande traditionnelle du matin

Un matin nous décidons de nous lever aux aurores afin d’aller observer l’offrande traditionnelle aux moines.

Je m’imagine déjà le long cortège s’avancer, file safran, sébile à la main et pieds nus, devant les fidèles agenouillés devant leur panier de riz, dans une atmosphère feutrée et respectueuse baignée de la pale clarté du matin. Ces images en tête, nous nous rendons dans une des rues principales de la ville, encore silencieuse à cette heure où le frais domine. Quelques fidèles s’apprêtent et quelques curieux comme nous se tiennent un peu à l’écart en attendant l’arrivée de la procession. Je désigne à Fred une série de petits tapis installés sur le trottoir et sur lesquels des paniers de riz sont déjà disposés ; nous pensons alors que ce sont des laotiens qui ont pris soin de préparer leur offrande en attendant les moines.

C’est alors que 4 minibus arrivent en trombe et freinent brutalement : une horde de touristes asiatiques et européens en jaillit et prend place… les tapis, en fait, les attendaient. Une laotienne équipée d’un micro prévient de l’arrivée du cortège tandis qu’une autre se saisit de tous les appareils photos afin d’immortaliser leur propriétaire en train de faire l’offrande. La file de centaines de moines arrive lentement et nous voyons les touristes en place s’affairer à attraper des boulettes de riz gluant. Certains sont restés debout et dominent les religieux alors que la tradition veut que le fidèle se tienne plus bas. Une française crie à sa copine : « Ouah ! Le riz colle mais in extremis j’ai réussi à faire une boulette pour la lancer dans la casserole du moine ! Trop forte ! ». De partout crépitent des flashs et des photographes gênent le passage de la procession pour avoir la tête du vénérable en gros plan. Un jeune moine d’une dizaine d’années est vite repéré : il est attrapé, retourné, arrêté pour que sa pose soit immortalisée. De l’autre coté de la rue j’ai les yeux humides et la boule au ventre. Et je me demande ce qui se passe dans la tête des religieux projetés à Disneyland. Notre couette nous manque soudain cruellement : la prochaine fois, c’est promis, nous resterons couchés !

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