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En route vers Luang Prabang

La route vers Luang Prabang est longue mais n’en finit pas d’être divertissante. Jusqu’à Vang Vieng les paysages rencontrés offrent au regard toute les nuances de marron : marron clair la piste et la poussière qui recouvre tout, beiges les maisons aux cloisons de bambous et aux toitures de paille devant lesquelles sont entassés paniers et corbeilles tressés, ocre le paysage séché par l’absence de pluie, la chaleur et couvert d’une fine pellicule de poussière, marron foncé la robe des vaches et des buffles que l’on croise de part et d’autres de la route… puis le marron cède la place au vert de temps a autre lorsque, a la faveur d’une zone plus humide, on voit apparaitre des champs verts et des arbres aux feuilles persistantes sur lesquels tranche le rouge d’une piste ponctuée ca et la de taches verdoyantes de feuilles de bananiers. Eparses, les fleurs de lotus qui se nichent dans chaque point d’eau apportent une touche rose vif a l’ensemble.

Et le ciel est blanc. Plus l’on s’approche de Vang Vieng et plus il semble qu’il devienne brumeux jusqu’à couper l’horizon et toutes perspectives. Et les falaises karstiques de Vang Vieng apparaissent, comme sorties d’un songe, et c’est une baie d’Ha Long terrestre que nous voyons progressivement surgir. Et le bleu domine alors mais pas un bleu éclatant, un bleu pale, paste, qui s’atténue et laisse deviner subtilement les reliefs plus lointains jusqu’à les fondre dans un brouillard qui recouvre tout et qui va jusqu’à absorber un soleil rougeoyant, encore haut pourtant dans le ciel, pour le ranger dans son enveloppe cotonneuse, nous privant ainsi des couleurs du couchant. Le même sort est réservé aux étoiles dont pas une ne brillera dans le ciel. Tant pis : nous rangeons l’astrolabe et sortons la frontale.

Apres Vang Vieng la route est encore longue pour Luang Prabang et le paysage change radicalement. La piste s’enfonce progressivement dans la montagne, succession de virages qui serait promesse d’une vue splendide si la brume ne recouvrait pas les vallées. Le décor est lunaire, les pans de la montagne brulés mettent la terre a nue, une terre devenue noire, cendres, veinée ca et la de pistes ocres et rouges qui contrastent avec la noirceur et qui sillonnent entre des spectres d’arbres rabougris et consumés. La saison des brulis a commencé et l’essartage façonne un nouveau paysage, nature sacrifiée aux cultures a venir. Est-ce cette fumée qui voile le soleil et bouche le ciel ? En partie surement. Et des montagnes dans lesquelles se niche Luang Prabang nous ne verrons toujours que les premiers reliefs, toujours cette impression de songe un peu brumeux qui entoure la ville de mystère et de fumée, rappel que nous ne voyageons pas dans une carte postale mais dans un pays avec ses réalités et ses contraintes, climatiques ou économiques.

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